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Décision du Tribunal Mixte des Nouvelles Hébrides

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Mary GILU c La Commission du Contentieux Electoral [1976] VUTM 7; No 2483 et 2484 (29 July 1976)

TRIBUNAL MIXTE DES NOUVELLES – HEBRIDES


Affaires N°- 2483 et 2484
Jugement N°- (D) 3/76 du 29 juillet 1976

CONTENTIEUX ELECTORAL


Elections à l’Assemblée Représentative du 10 novembre 1975 pour la désignation des représentants de la population de la Circonscription Urbaine de Luganville.


Appels déposés par Mary GILU, Georges CRONSTAEDT et Louis VATU


Contre


La Décision. N°- 3 de la Commission du Contentieux Electoral du 7 mai 1.976.


JUGEMENT


Les résultats des élections des membres de l’Assemblée Représentative tenues dans la Circonscription Urbainede Luganville le 10 novembre 1975 ont été les suivants :


SHEM RARUA
762 voix - élu
PHILIBERT de MONTGREMIER
758 voix - élu
MARY GILU
705 voix - élue
GEORGFS CRONSTAEDT
681 voix
MICHEL NOEL
678 voix
FRANK HENDERSON
649 voix
KEN HUTTON
77 voix
AUGUSTIN CHEUNG
8 voix

L’élection a été contestée en vertu de l’article 94 du Règlement Conjoint N°30 de 1975 relatif aux élections à l’Assemblée Représentative par lettre en date du 10 décembre 1975 adressée a la Commission du Contentieux Electoral demandant que l’élection soit annulée pour irrégularité.


La Commission du Contentieux a à tour de rôle statué sur les allégations d’irrégularité exposées dans la lettre des requérants du 10 décembre 1975 sous les quatre titres suivants :


1ère allégation :
Vote de personnes fictives
(Vote by fictitious persons)
2ème allégation :
Vote de personnes mineures
(Vote by people under age)
3ème allégation :
de personnes ne remplissant pas les conditions de résidence
(vote by persons who did not comply with the residency requirements)
4ème allégation :
Utilisation de procédés illégaux pour influencer les électeurs
(Use of illegal actions in order to put pressure upon the electors).

La Commission du Contentieux a jugé non prouvée la 1ère allégation.


En ce qui concerne la 2ème allégation, la Commission l’a jugée établie relativement à 8 électeurs dont elle a. annulé les voix.


En ce qui concerne la 3ème allégation, la Commission l’a jugée établie relativement à 57 électeurs dont elle a annulé les voix.


La Commission a rejeté la 4ème allégation.


Compte tenu du fait qu’elle a annulé un total de 65 votes exprimés aux élections et que 56 voix seulement séparaient les candidats britanniques Mary GILU et Frank HENDERSON, la Commission du Contentieux a annulé l’élection de Mary GILU.


Conformément à l’article 94(4) du R.C. 30 de 1975 et à l’article 2 du. Règlement de Procédure d’Appel en matière de Contentieux Electoral du 28 octobre 1975, Mme. Mary GILU a interjeté appel de la décision de la Commission du Contentieux. Deux requêtes d’appel ont par la suite été déposées au Tribunal Mixte par un électeur, Louis VATU, et par l’un des candidats battus aux élections, Georges CRONSTAEDT, demandant l’annulation totale du scrutin.


Mme. GILU a fondé son appel sur le seul moyen que la Commission s’était trompée dans son interprétation des faits et des preuves et, dans un mémoire déposé le 25 mai 1976 à l’appui de sa requête, elle a précisé les points sur lesquels elle prétendait que la Commission s’était ainsi trompée.


Louis VATU a. fait appel au motif que les irrégularités commises avant et pendant l’élection étaient assez nombreuses pour constituer une fraude et que toute l’élection devrait être annulée.


Georges CRONSTAEDT a fondé son appel sur deux moyens; le second, qui a d déjà fait l’objet d’un jugement avant dire droit, consistait à dire que l’Echange de Notes du 29 août 1975 qui prévoyait la création de l’Assemblée Représentative et en application duquel n’avait été édictée la législation relative aux élections, n’avait pas été mis légalement en vigueur au moment des élections. Le Tribunal a rejeté ce moyen comme étant un point sur lequel, en sa qualité de cour d’appel en matière de contention électoral, il était incompétent pour statuer. Le premier moyen [sic] cet appelant était basé sur la conclusion de la Commission du Contentieux que les listes électorales de la Circonscription Urbaine de Luganville avaient été faussées en raison du fait que les prescriptions des articles 6 et 7 du Règlement Conjoint N°8 de 1975 sur les Commissions Electorales n’avaient pas été observées par les Agents de l’inscription et la Commission Electoral de Santo et que ceci, ensemble avec d’autres irrégularités, avait conduit la Commission du Contentieux à déclarer que la liste électorale de Santo n’était pas un document fiable pour de futur élections, et à annuler l’élection de Mary GILU. L’appelant a plaidé que la Commission du Contentieux s’était trompée en annulant l’élection d’un seul candidat en ce que, dès lors qu’il a été établi que les Agents de l’Inscription ne se sont pas conformés aux prescriptions de la loi, toutes les inscriptions doivent devenir suspectes et non seulement celles des 65 personnes dont la Commission a trouvé qu’elles n’avaient pas les qualifications requises de résidence ou d’âge, et qu’en conséquence la Commission aurait dû annuler le scrutin tout entier.


Ces trois appels ont traité de questions relatives à l’inscription d’électeurs. Ils peuvent donc sans inconvénient être joints et le Tribunal en a ainsi décidé dès le début de la procédure. En même temps le Tribunal a décidé que la Commission du Contentieux, dans son examen d’un contentieux électoral (et, par suite, ce Tribunal sur appel de la décision de la Commission) avait compétence pour prendre en considération des objections portant sur des irrégularités commises dans la préparation de la liste électorale et posant notamment la question de savoir si un électeur avait ou non la qualification de résidence nécessaire pour son inscription.


Le Tribunal a demandé, au début de la présente instance, à Me. D.N. HUDSON, Avocat des Indigènes ad hoc représentant Mary GILU et Shem RARUA, et à Me. A. de PREVILLE, comparaissant pour Louis VATU et Georges CRONSTAEDT, de présenter leurs observations sur le point de droit préliminaire suivant :


Selon la loi relative aux élections à l’Assemblée Représentative, telle qu’elle existait le 10 novembre 1975, était-il possible à un électeur dont le nom était inscrit sur la liste électorale d’une circonscription de faire transférer son nom sur la liste d’une autre circonscription en prouvant qu’il avait la qualification de résidence requise pour son inscription dans cette autre circonscription et de faire radier son nom de la liste électorale de la circonscription d’origine.


Me de PREVILLE s’est référé à l’article 18 du R.C. 30 de 1975 (relatif à l’Assemblée Représentative) qui dispose "... Chaque électeur est inscrit dans la section électorale où il réside (normalement) à la date de la clôture des listes." (Le mot "normalement" à été rétroactivement supprimé par le R.C. 42 de 1975 pris le 6 novembre 1975, après la date fixée pour la clôture des listes dans la, circonscription urbaine de Luganville). Il a exposé qu’en dépit du fait qu’il n’existe aucune définition de l’expression"où il réside normalement" ou "où il réside", dans le R.C. 30 de 1975, il est tout à fait clair à la lumière d’une législation antérieure relative aux élections faite en 1975 qu’une résidence d’au moins 12 mois dans la zone de recensement est requise pour être considéré comme électeur dans cette zone. Il a fondé ses conclusions sur le fait due le R. C. 1 de 1975 sur les assemblées locales, relatif aux conseils municipaux et communaux, prescrit dans son article 4 une période de 12 mois de résidence pour pouvoir être électeur de ces assemblées locales. Ce règlement a été suivi en mars 1975 par le R. C. 8 de 1975 sur les Commissions Electorales dont le but était de créer les Commissions Electorales chargées d’établir les listes électorales provisoires à partir desquelles seraient préparées les listes officielles qui seraient utilisées à la fois pour les élections locales et territoriales. La liste établie à Santo pour l’élection du Conseil Municipal au mois d’août 1975 était basée, en accord avec l’article 4 du R.C. l de 1975, sur la condition de résidence de 12 mois. Lorsque, à la suite de l’Echange de Notes du 29 août 1975 relatif à la création de l’Assemblée Représentative, le R.C. 30 de 1975 a été édicté en septembre 1975 pour réglementer les élections à l’Assemblée Représentative, l’article l(1) de ce règlement a disposé comme suit:


"(1) L’élection des représentants de la population à l’Assemblée Représentative a lieu au scrutin secret fondé sur les listes électorales préparées conformément au Règlement Conjoint N°8 de 1975 relatif aux Commissions Electorales."


En conséquence la liste électorale pour la municipalité de Luganville est devenue la base de la liste électorale pour les élections à l’Assemblée Représentative. En ne perdant pas de vue qu’en application de l’article 2 § 2(a) de l’Echange de Notes du 29 août 1975 les limites territoriales de la Circonscription Urbaine de Luganville étaient celles fixées pour les élections municipales, et que les formulaires utilisés pour les déclarations de résidence d’un électeur, pour les deux élections locales et territoriales, mentionnent ......années et non jours ou mois, il est inconcevable qu’en édictant le R.C. 30 de 1975, l’Administration Conjointe ait soudain décidé de modifier la condition de résidence d’un électeur Me de PREVILLE a exposé que s’il est admis que la condition de résidence durant 12 mois a. été maintenue pour un électeur pour les collectivités centrales, comme pour un électeur pour les assemblées locales, il était dès lors impossible pour un électeur inscrit dans une municipalité ou une circonscription autre que Santo-Ville, de se faire transférer sur la liste de Santo-Ville, car il ne pouvait justifier une durée suffisante de résidence, étant donné qu'il s’est écoulé seulement 7 mois depuis le début de l’établissement des listes après la création de la Commission Electorale de Santo le 26 mars 1975, jusqu’à la date de la clôture des listes, au cours desquels l’inscription nouvelle devait être faite. Dans l’éventualité d’un électeur inscrit par erreur dans un endroit autre que celui où il réside normalement, - quand par exemple il a été inscrit pendant qu’il se trouvait dans son île d’origine en congé, venant de Santo où il avait la condition de résidence de 12 mois, et où il était revenu à la date des élections,- Me. de PREVILLE a exposé que le transfert ne pouvait titre effectué que sur demande, en vertu de l’article 7(2) du R.C. 8 de 1975, à la Commission Electorale de Santo. Il a exposé qu’il n’y a aucune disposition légale pour permettre à un Agent de l’Inscription de Santo de transférer sur la liste de Luganville un électeur déjà inscrit sur une liste électorale d’une autre circonscription, et il a demandé que les listes électorales soient vérifiées, et que les votes de tous électeurs révélés transférés d’une autre circonscription électorale à celle de Santo-Ville, soient déclarés nuls.


En réplique, Me. HUDSON a exposé qu’il est clair qu’en utilisant l’expression "où il réside normalement" dans l’article 18 du R.C.30 de 1975 l’Administration Conjointe avait décidé que pour avoir la qualité d’électeur pour l’Assemblée Représentative, il n’était plus exigé de justifier d’une durée de résidence de 12 mois, mais qu’il était seulement nécessaire de justifier d’une résidence normale dans la circonscription. Il a ajouté que la suppression rétroactive du mot "normalement" par le R.C. 42 de 1975 rend ceci plus évident. Il a maintenu qu’il était possible pour un électeur demandant le transfert de son inscription de la demander en vertu de l’article 3(3) du R. C. 30 de 1975 aux responsables du Bureau Electoral et que ceux-ci, en vertu du même texte, étaient habilités à effectuer ce transfert. Il a exposé que les dispositions de l’article 3(3) du
R. C. 30 de 1975 prévalent sur celles de l’article 7(2) du R. C. de 1975. (L’article 3(3) du R.C. 30 de 1975 dispose :


"Des exemplaires des listes électorales doivent être mis à la disposition du public pour consultation dans les bureaux des Délégués pendant les heures normales d’ouverture pendant une période de deux semaines précédant la date fixée pour leur clôture, conformément au paragraphe 1 ci-dessus. Les Délégués peuvent également prendre toute autre mesure qu’ils considèrent nécessaire pour la, publication des listes auprès des personnes intéressées. Pendant cette période toute personne est habilitée, après avoir examiné les listes, à déposer des réclamations au sujet de l’inclusion ou de l’omission d’un nom quelconque. Ces réclamations peuvent être présentées à l’un ou l’autre des Délégués qui, si nécessaire, les transmet par écrit au responsable du bureau électoral établi par les Commissaires-Résidents à PORT-VILA ou à SANTO. Elles peuvent également être présentées directement par écrit au responsable desdits bureaux électoraux. Le bureau électoral doit effectuer une enquête au sujet de chacune de ces réclamations et sa décision en ce qui concerne l’addition ou la suppression d’un non, qui doit être prise au plus tard 24 heures avant l’heure fixée pour le début du scrutin, est définitive.")


Le Tribunal est de l’avis de Me. HUDSON sur le point que l’utilisation de l’expression "où il réside normalement" (ou: «  ou il réside » comme elle est devenue par la suite) dans l’article 18 du R. C. 30 de 1975 indique clairement que la seule résidence dans la circonscription électorale de Santo-Ville suffisait pour avoir la qualité d’électeur en vertu du R. C. 30 de 1975 et que pour l’élection des membres de l’Assemblée Représentative il n’était pas nécessaire de prouver une durée de résidence de 12 mois à Santo-Ville comme il était exigé pour les élections municipales en vertu du R. C. 1 de 1975. Ceci est amplement confirmé par un Mémorandum Conjoint en date du 7 août 1975 intitulé : "Elections à l’Assemblée Représentative: Abolition de la condition de résidence pour l’inscription des électeurs" adressé par les Commissaires-Résidents aux Délégués des Iles du Nord, et auquel il sera encore fait référence dans le présent jugement; par la publicité mentionnée par la Commission du Contentieux à la page 7 de sa décision et à laquelle l’attention du Tribunal a été attirée par M TREADWELL, l’Attorney-General, qui comparaissait en qualité de "amicus curiae" pour le Commissaire-Résident britannique, et également par les lettres adressées en septembre à Mlle. BIDAL, du bureau électoral de Santo, par le bureau électoral de Port-Vila, documents qui ont été produits devant la Commission du Contentieux.


L’avis publié en anglais et en bichelamar dans le "New Hebrides News" (périodique diffusé par le Service d’Information de la Résidence Britannique à Port-Vila) d’août 1975, pages 10 à 12, est ainsi conçu dans sa phrase d’introduction: "The Resident Commissioners have decided that it will be no longer necessary to live in one place for 12 months before you can be registered as a voter for the Representative Assembly at that place" ("les Commissaires -Résidents ont décidé qu’il ne serait plus nécessaire de vivre pendant 12 mois dans un endroit pour pouvoir y être inscrit comme électeur pour les élections à l’Assemblée Représentative"). Cet avis invite ensuite les personnes qui ont vécu dans une zone de recensement pendant au moins 12 mois et qui s’y trouveront à la date des élections à demander leur inscription dans cette zone et, dans le cas où ces personnes auraient déjà été inscrites comme électeurs dans leurs zones d’origine, à demander leur transfert d’inscription dans la zone où elles vivent si elles s’y trouvent toujours à la date des élections.


Dans le même esprit, la lettre du 3 septembre 1975 adressée pair le bureau électoral de Port-Vila, à Mlle. BIDAL, dispose en son deuxième paragraphe, 3ème alinéa:


"La semaine prochaine, sur la radio, on va avertir les gens qui ont des cartes bleues, mais qui résident actuellement à Luganville, qu’ils peuvent maintenant se faire inscrire sur la liste de Luganville (même s’ils sont là depuis moins d’un an). Quand ces gens se rendront au bureau, il faut leur faire des castes mauves et des castes vertes, puis récupérer leurs cartes bleues et nous les réexpédier. Vous garderez les cartes vertes afin de refaire la liste."


En conséquence il était possible pour un électeur inscrit dans une autre circonscription que Santo-Ville, de solliciter son transfert sur la liste de Luganville, même s’il pouvait justifier d’une résidence de 12 mois dans cette circonscription. De l’avis du Tribunal il était suffisant pour une telle personne de justifier qu’elle y vivait, par opposition à une simple visite.


Il n’est pas possible, cependant, d’accepter la suggestion de Me. HUDSON que les responsables du bureau électoral, tel que prévu l’article 3(3) du R.C. 30 de 1975, étaient habilités à transférer sur la liste électorale de Santo-Ville, un électeur inscrit dans une autre circonscription. Un tel transfert est écarté par les dispositions du R.C. 30 de 1975 lui-même. Considérons en particulier l’article 1(l) du R.C. 30 de 1975 avec sa référence aux "listes électorales préparées conformément au R.C. 8 de 1975 sur les Commissions Electorales" et l’article 3(l) du R. C. 30 de 1975 qui dispose:


"Les listes électorales de chaque section au sein de chaque circonscription seront closes à une date fixée par Décision Conjointe des Commissaires-Résidents au plus tôt un mois avant la date fixée pour le début du scrutin; toutefois, des dates différentes pourront être arrêtées pour la clôture des listes électorales en ce qui concerne l’inclusion ou l’omission de noms d’électeurs d’une part, et le transfert de noms d’électeur d’une liste sur une autre, conformément aux dispositions du paragraphe 2 de l’article 7 du Règlement (à savoir le R.C. 8 de 1975), d’autre part."


et l’article 18 du R. C. 30 de 1975 qui dispose :


"Sous réserve de l’article 7 du Règlement (à savoir le R. C. ° de 1975), chaque électeur est inscrit dans la section électorale où il réside (normalement) à la date de la clôture des listes électorales."


De plus la Décision Conjointe N° 96/2 de 1975 prise en application du R.C. 30 de 1975, prévoit avec précision dans son paragraphe (l) la clôture des listes électorales dans chaque circonscription le 31 octobre 1975 "en ce qui concerne les transferts d’inscription conformément à l’article 7 du R.C. 8 de 1975".


En considérant ces textes, il apparaît très clairement au Tribunal (qui sur ce point rejoint l’avis de l’Attorney-General) que la seule procédure légale de transfert d’inscription d’un électeur est celle de l’article 7(2) du R.C. 8 de 1975.


Ce texte dispose :


"Toute personne répondant aux critères requis pour être électeur dans .....une Circonscription Electorale Territoriale peu t, au moment de la révision des listes électorales, demander auprès de la Com mission Electorale appropriée, le transfert de son nom sur la liste électorale de toute autre .....Circonscription Electorale......Lorsqu’elle aura, apporté à la Commission Electorale la preuve qu’elle répond aux critères pour être électeur dans cet autre endroit, la suppression et le transfert approprié de son nom seront effectués et sa carte d’électeur sera soit modifiée, soit retirée pour établissement d’une nouvelle carte."


L’article 10(3) du R.C. 8 de 1975 dispose que les listes électorales "seront révisées de temps en temps conformément à la réglementation prévue à cet effet, par les Commission Electorales conformément à la procédure prévue cet effet".


Le Tribunal a déjà donné son opinion dans sa décision relative à un point de droit préliminaire soulevé dans cet appel (au sujet de la compétence de la Com mission du Contentieux Electoral de connaître des questions relatives aux irrégularités commises dans la préparation des listes électorales) qu’il n’existe, dans le texte relatif à l’élection pour l’Assemblée Représentative, aucune disposition pour la révision des listes électorales par la Commission Electorale, telle qu’envisagée par l’article 10(3) du. R.C. 8 de 1975 ci-dessus visé. De plus, Me. HUDSON, au cours de ses conclusions relatives à la compétence de la Commission du Contentieux, a laissé entendre que l’Administration Conjointe avait décidé que la procédure de révision définie par le R.C. 8 de 1975 et confiée à la Commission Electorale, était irréalisable. A sa place, la procédure prévue par l’article 3(3) a été reconnue la seule possible dans les circonstances présentes.


L’Attorney-General a exposé qu’en cas de conflit entre l’article 3(3) du R.C. 30 de 1975 et l’article 10(3) du R.C. de 1975 les dispositions du premier doivent prévaloir comme étant les plus précises et les dernières en date. Il a suggéré qu’au cas où il serait prouvé que des transferts d’inscription n’aient pas été effectués strictement en conformité avec les prescriptions de l’article 7(2) du R.C. 8 de 1975, il faudrait considérer cela comme une irrégularité n’affectant pas le résultat du scrutin. Il a exposé que des transferts ne seraient illégaux que si l’électeur dont l’inscription a été transférée n’était pas habilité à être inscrit et qu’une élection ne serait entachée de nullité que si de tels transferts illégaux en avaient affecté le résultat.


Le Tribunal a obtenu des Co-Présidents de la Commission Electorale de Santo, pour la période du 26 mars (date de nomination de la Commission) au 5 novembre 1975 (date de clôture de la liste électorale), confirmation qu’aucune demande de transfert d’inscription n’a été reçue par la Commission pendant cette période. Il a été informé que les demandes de transfert ont été traitées conformément aux instructions reçues des Commissaires-Résidents par les Délégués, exposées dans le Mémorandum Conjoint en date du 7 août 1975 intitulé: "Elections à l’Assemblée Représentative: Abolition de la condition de résidence pour l’inscription des électeurs", dont une copie a été fournie au Tribunal et auquel il a déjà été fait référence. Les paragraphes 6 et 7 de ce Mémorandum Conjoint, pour autant qu’ils s’appliquent au cas d’espèce, sont ainsi conçus:


"Les personnes vivant éloignées de leur lieu d’origine et qui précédemment ne pouvaient être inscrites dans leur lieu de résidence actuelle en raison du fait qu’elles y séjournaient depuis moins de 12 mois, pourront maintenant le faire. Il conviendra d’encourager ces personnes qui ont été inscrites à titre provisoire dans leur section électorale d’origine, à se faire réinscrire dans le lieu où elles vivent actuellement. La tâche de réinscrire les personnes habitant à Port-Vila et qui précédemment n’avaient pas la possibilité d’y voter, incombera essentiellement au bureau électoral de Port-Vila et sera expliquée dans un Mémorandum distinct. Pour ce qui est de Santo et des zones rurales, les Délégués devront dès que possible donner des instructions aux Agents de l’Inscription afin qu’ils contactent les personnes touchées par l’abolition de la condition de 12 mois de résidence et expliquent qu’elles peuvent maintenant se faire (inscrire) dans le lieu où elles résident. Ceci fera l’objet d’une certaine publicité prochainement, mail il convient de souligner que tous les moyens raisonnables devront être mis en oeuvre afin de donner aux personnes concernées l’occasion de se faire réinscrire; elles risquent en effet de se trouver dans l’incapacité de voter.


Au moment de réinscrire une personne, l’Agent de l’Inscription devra récupérer la carte d’électeur de couleur bleue et la remplacer par une nouvelle portant le numéro de la section électorale pour laquelle l’électeur est réinscrit. L’ancienne carte bleue devra être envoyée au bureau électoral de Port-Vila accompagnée du duplicata de couleur verte de la nouvelle carte, aussitôt que possible de manière à ce que le nom de l’électeur puisse être supprimé de la liste électoral sur laquelle il figurait précédemment et ajouté sur la liste de sa nouvelle section électorale."


Le paragraphe 7 de ce Mémorandum prescrit une procédure de transfert d’inscription autre que celle fixée par l’article 7(2) du R.C. 8 de 1975. Il n’a à aucun moment été suggéré, et le Tribunal n’y songe pas, que les instructions contenues dans le Mémorandum Conjoint puissent être autre chose que des directives administratives n’ayant pas force de loi.


L’Attorney-General a plaidé que la Commission Electorale de Santo pouvait désigner des agents, soit expressément soit implicitement, chargés d’exécuter les fonctions attribuées à la Commission par l’article 7(2) et que ces agents n’avaient pas besoin d’être nommés Agents de l’Inscription. Le Tribunal ne peut accepter cette argumentation. Le seul pouvoir de nomination. conféré aux Commissions Electorales par le R.C. 8 de 1975 est celui, contenu dans l’article 3(1), de désigner par écrit un fonctionnaire ou un agent pour remplir les fonctions d’Agent de l’Inscription.


Même si le Tribunal admet que la procédure définie à l’article 3(3) du R.C. 30 de 1975 constituait une révision de la liste électorale suffisante pour satisfaire aux prescriptions de l’article 7(2) du R.C 8 de 1975, comme l’a suggéré l’Attorney-General, il ne peut donner son adhésion à sa suggestion qu’il est possible à un Agent de l’Inscription ou à toute autre personne autorisée, soit expressément soit implicitement par la Commission Electorale, d’opérer le transfert d’inscription d’un électeur en vertu de l’article 7(2). Aux yeux du Tribunal, ce devoir est imposé par l’article 7(2) précisément à la Commission Electorale qui doit se convaincre que la personne qui demande le transfert de son inscription est qualifiée comme électeur dans la circonscription dans laquelle elle a demandé son transfert d’inscription.


Le Tribunal en est par conséquent venu à la conclusion que tous les transferts d’inscription effectués sur la liste électorale de Santo-Ville à partir de la liste d’une autre circonscription pour les élections à l’Assemblée Représentative en novembre dernier sont illégaux en ce qu’ils ne sont pas conformes aux dispositions de l’article 7(2) du R.C. 8 de 1975. 'Tons les électeurs qui ont ainsi été illégalement transférés sur la liste électorale de Santo-Ville ont perdu le droit de prendre part on vote et leurs voix doivent être annulées.


Pour s’assurer du nombre de ces transferts d’inscription effectués sur la liste électorale de Luganville, le Tribunal a vérifié les noms d’électeurs rayés de toutes les listes électorales des circonscriptions autres que celle de Luganville pour voir si des noms ainsi rayés ont été portés sur les listes de Luganville. Il a également vérifié tous les noms cités dans les annexes l, 2 et 5 du recours initial daté du 10 décembre 1975 devant la Commission du Contentieux, ainsi que ceux cités dans la décision de la Commission à la page 3 (relativement à la 1ère allégation) et à la page 9 (relativement à la 3ème allégation) afin de savoir si quelques uns de ces noms avaient été inscrits sur les listes électorales de circonscriptions autres que celle de Santo-Ville. Il a été découvert que 83 noms avaient été transférés des listes électorales d’autres circonscriptions sur celles de Santo-Ville. 27 noms parmi ceux ainsi transférés n’avaient pas été radiés des listes électorales initiales. Tous ces transferts d’inscription étaient illégaux.


Le Tribunal a ensuite vérifié les listes utilisées comme listes d’émargement dans les bureaux de vote aux élections à Luganville et a découvert que 76 parmi ces 83 électeurs transférés avaient participé au vote. En conséquence ces 76 voix doivent être annulées.


Le Tribunal passe à présent à l’étude du premier moyen d’appel de Georges CRONSTAEDT fondé sur le fait que la Commission du Contentieux a jugé que les listes électorales de Luganville avaient été faussées par la non-observation par les Agents de l’Inscription et la Commission Electorale de Santo des prescriptions du R.C. 8 de 1975, tout le scrutin, et non seulement l’élection d’un seul candidat, devrait être annulé.


Ce moyen d’appel a trait essentiellement aux conclusions de la Commission du Contentieux relativement à la 3ème allégation: vote de personnes ne remplissant pas les conditions de résidence. Le Tribunal a éprouvé de la difficulté à suivre le raisonnement de la Commission sur cette allégation ou à établir à la lecture de sa décision, sur quelles preuves elle a fondé ses conclusions.


La Commission du Contentieux a découvert que les 57 personnes nommées aux pages 3 et 9 de sa décision n’avaient pas la qualification de résidence les habilitant à voter à l’élection dans la Circonscription Urbaine de Luganville et a annulé leurs votes. Après avoir annulé l’élection de Mme. GILU, la Commission a ajouté à sa décision in déclaration suivante:


"La Commission a établi clue les agents recenseurs n’ont pas obtenu de documents établissant la résidence. Mais elle estime que ces irrégularités étaient insuffisantes pour annuler toutes les inscriptions supplémentaires à Luganville. Enfin, l’attention des autorités compétentes est attirée sur le fait que la liste électorale actuelle n’est pas un document fiable pour de futures élections."


La conclusion que les agents recenseurs n’avaient pas obtenu les documents établissant la résidence, à laquelle la Commission se réfère dans le passage ci-dessus, apparaît au bas de la page 7 de sa décision:


"Attendu que les agents recenseurs n’ont pas obtenu les documents justificatifs de résidence exigés par la loi pour délivrer une carte électorale et inscrire sur la liste.


Attendu que la condition de résidence est un élément constitutif du droit de vote dans une circonscription électorale donnée. "


Le Tribunal n’a pu vérifier sur quelles preuves la Commission du Contentieux s’est appuyée pour arriver à cette conclusion que les Agents de l’Inscription n’avaient pas obtenu les documents requis par la loi pour justifier de la résidence (il n’a rien trouvé dans les notes et document produits pour la conforter), et à ses yeux il n’apparaît pas clairement de la législation relative aux élections quelles sont exactement les prescriptions légales concernant la production, par des néo-hébridais, de preuves documentaires pour être inscrit comme électeur.


L’article 3-1.a) de l’annexe à l’Echange de Notes du 29 août 1975 dispose :


"Les représentants des populations sont élus au suffrage universel des personnes des deux sexes, majeures de vingt-et-un ans, ayant résidé aux Nouvelles-Hébrides pendant au moins les trois années précédant immédiatement la date du commencement du scrutin (nonobstant toutes absences temporaires au cours de cette période à condition que leur total n’excède pas six mois) et inscrites sur la liste électorale appropriée sous réserve qu’elles n’entrent pas dans l’un des cas d’incapacité prévus par le règlement conjoint fixant la procédure électorale."


Les dispositions du R. C. 8 de 1975 qui s’appliquent autant à l’inscription d’électeurs pour les élections locales que pour les élections territoriales (voir article 1.) sont les suivantes :


"Art. 4. Les agents mentionnés aux paragraphes l et 2 de l’article 3, pourront faire appel, dans un endroit quelconque, à deux habitants susceptibles de l’aider à déterminer l’âge ou le lieu de résidence d’une personne quelconque ou à résoudre tout autre problème matériel pour l’établissement des documents électoraux provisoires; ces habitants devront apporter l’aide demandée.


Art. 5. Toute personne invitée par un agent de l’inscription à donner des renseignements sur lui-même, afin de permettre de déterminer si elle doit ou non être portée sur les documents électoraux provisoires, devra donner ces renseignements sans retard et selon le meilleur de son savoir et de sa conscience.


Art. 6. 1) Lorsqu’un agent de l’inscription examinera la possibilité d’inscrire une personne quelconque, en fonction de sa période de résidence dans un endroit quelconque, cette personne devra produire une attestation d’emploi ou tout autre document susceptible d’établir la durée de cette période de résidence.


Au cas où la personne ne disposerait pas d’une telle attestation ni d’autres preuves, la durée de cette période de résidence peut être établie de façon suffisante par la production d’une déclaration écrite, établie par l’électeur postulant selon la forme définie en la première Annexe, en la présence de l’agent de l’inscription qui sert de témoin.


Art. 8. Après avoir inscrit une personne sur les documents électoraux provisoires, l’agent de l’inscription, s’il est d’avis que cette personne remplit les conditions requises pour être électeur, lui délivrera une carte d’électeur..........".


L’article 9 constitue en infractions le fait de donner délibérément à un Agent de l’Inscription des renseignements erronés ou de fausses preuves et le fait pour un Agent de l’Inscription d’inscrire sciemment une personne ne remplissant pas les conditions requises ou de délivrer sciemment une carte électorale à une personne non habilitée à recevoir une telle carte. Ces infractions sont passibles, la première fois, d’une amende de 10 000 FNH et, en cas de récidive, de la même amende ou d’une peine de 3 mois d’emprisonnement ou des deux.


L’article 18 du R.C. 30 de 1975 dispose que tout électeur sera inscrit dans la zone de recensement dans laquelle il réside (normalement) à la date de la clôture de la liste électorale. (Ainsi qu’il l’a déjà été indiqué, le mot "normalement" a été supprimé rétroactivement par le R. C. 42 de 1975 après la date fixée pour la clôture des listes électorales.)


A la lecture des dispositions du R.C. 8 de 1975 reproduites ci-dessus, il apparaît au Tribunal qu’un Agent de l’Inscription n’est pas obligé en vertu de l’article 4 de faire appel à quelqu’un pour l’aider à déterminer l’âge, le lieu de résidence, etc. S’il fait ainsi appel à deux personnes, toutefois, ces personnes sont obligées par l’article 4 d’apporter l’aide requise.


De même, l’article 5, de l’avis du Tribunal, n’impose aucune obligation à un agent de l’inscription. Si, toutefois, un agent de l’inscription décide en vertu de cet article d’inviter une personne à donner des renseignements la concernant, l’article 5 oblige cette personne à donner ces renseignements.


L’article 6 impose à une personne demandant son inscription l’obligation de fournir à l’agent de l’inscription la preuve documentaire requise par cet article


"Lorsqu’un agent de l’inscription examinera la possibilité d’inscrire une personne quelconque, en fonction de la période de résidence dans un endroit quelconque."


Me de PREVILLE a plaidé qu’il apparaît très clairement des dispositions de l’article 8 (qui prescrit que l’agent de l’inscription doit être convaincu qu’une personne réunit les conditions avant de lui délivrer une carte d’électeur), et de celles de l’article 9(3) pénalisant l’inscription ou la délivrance de cartes à des personnes non habilitées à être inscrites ou à recevoir ces cartes, qu’un agent de l’inscription était requis, dans le case de toutes personnes demandant leur inscription, de se convaincre qu’elles remplissaient les conditions d’âge et de résidence nécessaires à l’inscription (et n’étaient pas frappées de l’une des incapacités prévues par l’article 2 du R.C. 30 de 1975). L’agent de l’inscription doit par conséquent dans tous les cas "examiner" si le demandeur réunit les conditions requises pour son inscription "en fonction de sa période de résidence dans un endroit quelconque", et par suite le demandeur doit dans tous les cas, qu’il soit néo-hébridais ou non, fournir une preuve documentaire de résidence.


L’Attorney-General a plaidé, cependant, que les obligation imposées à une personne demandant son inscription et à l’Agent de l’Inscription en vertu de l’article 6 ont seulement trait (a) demandes d’inscription pour les élections aux collectivités local (pour lesquelles, en vertu de l’article 4 du R.C. 1 de 1975, tous les électeurs doivent avoir 12 mois de résidence) et (b) aux demandes d’inscription par des expatriés en raison de la condition de résidence de trois années requise par l’article 3-l. a) de l’Annexe de l’Echange de Notes. Lorsqu’un Agent de l’Inscription est convaincu qu’une personne demandant son inscription pour les élections d’une collectivité territoriale est néo-hébridaise, aucune obligation ne lui est imposée par l’article 6 d’exiger, de la personne demandant son inscription, la production de preuve documentaires concernant sa résidence, en raison du fait que presque tous les néo-hébridais sont des résidents à vie et il n’y a par conséquent aucun besoin "d’examiner" s’ils réunissent les conditions d’inscription "en fonction de la période de résidence" De là, a suggéré l’Attorney-General, l’utilisation du mot "lorsque" au début de l’article 6.


La question, ainsi que la voit le Tribunal, est encore compliquée par la modification rétroactive de l’article 18 du R. C. 30 de 1975 par la suppression du mot "normalement". Le Tribunal a été informé que cet amendement visait précisément à permettre à un candidat aux élections à se présenter dans son île d’origine ou dans quelque endroit autre que celui de sa résidence normale. En élisant domicile, pendant une courte période avant la date de clôture des listes électorales, dans l’endroit où le désirait se présenter, il pouvait acquérir la qualification requise pour être électeur en vertu de l’article 18 R.C.30 de 1975 et donc pour être candidat à l’élection conformément aux dispositions de l’article 5 de l’Echange de Notes du 29 août 1975 qui prescrit entre autre que pour être éligible aux élections à l’assemblée Représentative une personne doit être inscrite « sur la liste électorale appropriée ».


L’article 18 du R C. 30 de 1975 s’applique aux électeurs en général, - et non précisément aux candidats aux élections. Ce qui s’applique aux électeurs qui se présentent comme candidats doit par conséquent s’appliquer aux gens qui ont qualité pour être simplement électeurs, et sur cette base il semble qu’il serait tout à fait possible à une personne résidant normalement, par exemple, à Ambrym, mais désirant pour quelque raison voter dans la Circonscription Urbaine de Luganville, d’établir un lieu temporaire de résidence à Santo avant la date de clôture de la liste électorale pour être habilité à se faire inscrire à Santo. Le Tribunal éprouve de la difficulté à croire que ceci est la loi ou que ceci était dans les intentions de l’Administration Conjointe. Ce n’est en tout cas pas la loi en France ou en Angleterre. Si toutefois c’est la loi aux Nouvelles-Hébrides cela explique alors la thèse de l’Attorney-general selon laquelle la production d’une preuve documentaire de résidence en vertu de l’article 6 du R.C. 8 de 1975 n’est pas requise dans le cas de Néo-Hébridais demandant leur inscription, ainsi que la rédaction surprenante de l’article 6.


Quoi qu’il en soit, il n’apparaît pas nécessaire au Tribunal de déterminer quelle est la loi en ce qui concerne résidence ou la preuve de la résidence car, comme il l’a déjà été dit, il n’a pu trouver aucune preuve pour soutenir la conclusion de la Commission du Contentieux que les Agents de l’Inscription à Santo ont négligé d’observer les prescriptions de la loi quant à l’obtention, des personnes demandant leur inscription, de preuves documentaires établissant la résidence. En conséquence il n’existe aux yeux du Tribunal aucune preuve que les listes électorales de Luganville aient été faussées, ainsi que l’a allégué M. CROUNSTAEDT dans son premier moyen d’appel. La Commission du Contentieux n’en est pas venue à la conclusion qu’une fraude avait été commise par quiconque ou que les listes électorales avaient été faussées par suite d’une action ou d’une omission des Agents de l’Inscription, pas plus qu’elle n’est allée jusqu’à dire que des irrégularités telles que celles qui se sont produites dans la préparation des listes ont invalidé les listes ou l’une quelconque d’entre elles. Tout ce qu’elle a fait, tout à fait à la fin de sa décision, a été d’attirer l’attention des autorités sur le fait "que la présente liste ne constitue pas un document fiable pour de futures élections". Ceci ne constitue rien que l’expression d’une opinion sans effet quelconque sur le résultat de l’élection.


Le Tribunal ne trouve par conséquent aucun motif pour annuler l’ensemble des élections dans la Circonscription Urbaine de Luganville et rejette ce moyen d’appel.


Enfin, revenant aux conclusions de la Commission du Contentieux:


Sur la 2ème allégation: La Commission a estimé que 8 personnes avaient voté alors qu’elles n’avaient pas l’âge requis : Marie Madeleine ROTOG, Judeson et Jerry ISAIAH, Mothey TIMTAKO, Charley BANI, Kelsi DABOUN, Jean Marie GARAE et Angela LILIAN. L’appelante Mary GILU ne conteste plus que ces personnes, exceptée Kelsi DABOUN, ne soient mineur de 21 ans, à la date des élections et le Tribunal estime erronée la constatation de la minorité de Kelsi DABOUN. De plus il n’a pu être vérifié si la jeune Marie Madeleine ROTOG avait réellement pris part au vote. En conséquence le Tribunal confirme la décision de la Commission sur la 2ème allégation, en ce qui concerne six électeurs, et déclare leur vote nul.


Sur la 3ème allégation: Parmi les 57 personnes dont les noms ont été cités par la, Commission, trois d’entre eux: Paul MELO, Judas HIGE et Ailine POINDI, résident à Santo-Ville, selon les renseignements communiqués par les Co-Présidents de la Commission Electorale de Santo. Il semble que la Commission du Contentieux soit arrivée à la conclusion que ces 57 personnes ne résidaient pas à Santo soit en interrogeant des témoins résidant à Santo, soit parce que ces personnes, convoquées devant la Commission, ne s’étaient pas présentées. Le fait qu’au moins 3 de ces 57 personnes résident à Santo-Ville, jette un doute sur la conclusion de la Commission concernant les 54 autres.


Quoi qu’il en soit, considérant que le Tribunal a annulé 76 votes exprimés par des électeurs irrégulièrement transférés dans la Circonscription de Santo-Ville, et qu’il a confirmé la décision de la Commission du Contentieux en ce qui concerne l’annulation de 6 votes exprimés irrégulièrement par des mineurs de 21 ans, le nombre total des votes déclarés nuls est de 82.


Il est établit en droit français et en droit anglais qu’aucune élection ne sera annulée en raison de quelque action ou omission par une personne en violation de ses fonctions officielles ayant trait aux élections ou de la législation électorale s’il apparaît au Tribunal statuant sur un contentieux électoral au cours duquel la question est soulevée que l’élection a été dirigée de manière à être substantiellement conforme aux prescriptions de la loi électorale et que l’action ou l’omission n’ont pas affecté ou ne pouvaient pas affecter le résultat de l’élection,- cf. "Halsbury’s Laws of England", 3ème édition, Vol.14, page 149, paragraphe 261; the Islington West Division Case, Medhurst c/- Lough et Gasquet (1901), 17 TLR 210 à 230, Kennedy J, rapporté dans 20 Dig. (Repl.) 116 N° 942, et Morgan c/- Simpson (1974) 3 AER 722 à 726, Lord Denning M. R.


Ces cas de jurisprudence ont trait à une violation des règles ou à une erreur se produisant à l’occasion de l’élection elle-même. Le Tribunal a jugé dans sa décision préliminaire sur la compétence de la Commission du Contentieux que, compte tenu le la nature inadéquate et contradictoire de la législation existante relative aux objections aux listes électorales et du manque de système convenable de révision des listes et compte tenu de l’importance, quant à son droit de voter dans une circonscription particulière, de la qualification de résidence d’un électeur dans cette circonscription, la Commission du Contentieux agissait entièrement dans les limites de sa compétence en mettant en doute le droit de vote d’électeurs au motif qu’ils n’étaient pas habilités à être inscrits comme électeurs, ne réunissant pas les conditions de résidence requises.


De l’avis du Tribunal les règles fixées pour la préparation des listes électorales par les Règlements Conjoints N° 8 et 30 de 1975 doivent être considérées comme faisant partie des règles relatives aux élections à l’Assemblée Représentative. Comme le Tribunal l’a indiqué dans sa décision préliminaire, les R.C.8 et 30 de 1975 ne contiennent aucune disposition pour la préparation et la révision des listes électorales comparable à celles existant en droit français et en droit anglais en vertu desquelles, lors de son examen d’un contentieux électoral, un tribunal ne peut prendre en considération des questions ayant trait à des irrégularités dans la préparation de la liste d’électeurs en raison des larges dispositions de la législation électorale concernant les objections à la liste et l’appel auprès des tribunaux de la décision d’un agent de l’inscription. Par conséquent, aux yeux du Tribunal, les principes énoncés par les cas de jurisprudence ci-dessus doivent être appliqués aux opérations d’inscription d’électeurs autant qu’à la conduite du scrutin lui-même.


Il apparaît des résultats publiés de l’élection dans la Circonscription Urbaine de Luganville, que:


84 voix séparaient Shem RARUA de Michel NOEL parmi les candidats néo-hébridais,


77 voix séparaient Philibert de MONTGREMIER de Georges CRONSTAEDT parmi les candidats français, et


56 voix séparaient Mary GILU de Frank HENDERSON parmi les candidats britanniques.


Les 82 voix que le Tribunal a déclarées nulles ont donc pu avoir un effet sur l’élection de Philibert de MONTGREMIER et de Mary GILU.


En vertu du caractère secret du scrutin prescrit par l’article 1er du R.C. 30 de 1975, le Tribunal ne peut savoir en faveur de qui les 82 personnes illégalement inscrites ont exprimé leur vote. On ne peut que dire que leurs voix ont pu avoir influencé le résultat de l’élection de M. Philibert de MONTGREMIER et de Mme. Mary GILU.


En conséquence le Tribunal confirme la Décision de la Commission du Contentieux Electoral du 7 mai 1976 annulant l’élection de Mme. Mary GILU, et au surplus déclare nulle l’élection de Mme. Philibert de MONTGREMIER.


Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique le vingt-neuf juillet mil neuf cent soixante-seize.


Le Juge Britannique :
D R DAVIS


Le Juge Français :
L CAZENDRES


Le Greffier p i :
P de GAILLANDE


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